Le CGEDD plaide pour une refondation de l'urbanisme commercial

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Face à la "prolifération des espaces commerciaux observée en France depuis cinq décennies" et à ses conséquences en termes environnementaux, humains et économiques, le CGEDD propose, dans un rapport remis à Emmanuelle Cosse jeudi 9 mars, la mise en place d’une "nouvelle orientation des politiques publiques en matière d’urbanisme commercial". De son côté, la ministre du Logement et de l’habitat durable lance un plan de mobilisation "pour réconcilier les dynamiques du commerce avec la ville durable".

 

C’est un document complémentaire à celui coproduit l’an dernier par l’Inspection générale des finances et le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) sur "la revitalisation commerciale des centres-villes" : Pierre Narring, coordonnateur, a remis, jeudi 9 mars à Emmanuelle Cosse, le rapport intitulé "Inscrire les dynamiques du commerce dans la ville durable", qu’il a réalisé avec Bruno Faréniaux, Rouchdy Kbaier et Dominique Stevens au nom du CGEDD. Forts de visites dans cinq villes françaises (Lille, Bordeaux, Poitiers, Saint-Étienne, Montpellier) et dans quatre pays européens voisins (Allemagne, Espagne, Italie, Belgique), les auteurs détaillent ce qui doit constituer, selon eux, "les fondements d’une nouvelle politique des périphéries urbaines et commerciales".
Car alors que les "observateurs et acteurs locaux sont de plus en plus nombreux à en déplorer les conséquences sur la qualité des paysages, l’organisation des villes et le devenir des centres urbains principaux ou secondaires, notamment dans les villes moyennes", "la prolifération des espaces commerciaux observée en France depuis cinq décennies […] semble se poursuivre de façon continue". Résultat, la France est le pays européen comptant la densité la plus importante de centres commerciaux, et "90 % des surfaces sont créées en périphérie". Avec, "on ne peut le nier", assure Emmanuelle Cosse, reprenant les mots du rapport, "le développement de friches commerciales et le risque de 'fuite en avant’ que présentent de nouveaux projets souvent plus massifs et plus éloignés". Les auteurs du rapport observent que l’urbanisme commercial reste "réfractaire" à la problématique du développement durable, pourtant de mieux en mieux pris en compte par les politiques d’aménagement du territoire, et soulignent que "les arguments relatifs au développement local et à la création d’emplois, souvent mis en avant par les porteurs de projets pour convaincre les élus locaux, s’avèrent de moins en moins crédibles".

Un réseau et un appel à projets

Face à ces déséquilibres d’ordre "environnemental, économique mais également humain", il y a "urgence à agir", réagit la ministre. Le CGEDD préconise donc la mise en œuvre d’une "nouvelle orientation des politiques publiques en matière d’urbanisme commercial". "Le temps est venu pour l’Etat d’initier un aggiornamento, lequel apparaît non seulement nécessaire mais désormais possible", écrivent les auteurs. Et Pierre Narring d’évoquer "trois facteurs positifs : une sensibilité de plus en plus forte aux questions de transition écologique, la possibilité d’organiser des systèmes de gouvernance plus robustes et à des échelles plus larges, et les questions que se posent les opérateurs eux-mêmes face à un mode de consommation qui évolue". La "refondation des principes de l’urbanisme commercial" souhaitée par le rapport s’appuie sur trois axes majeurs, explique-t-il : accorder la priorité à la consolidation des centres-villes et des centres commerciaux existants, pour produire un urbanisme cohérent qui évitera la consommation de nouveaux espaces ; renforcer les dispositifs de régulation et de planification qui encadrent l’urbanisme commercial, et enfin engager une politique de restructuration des entrées de villes, dans une logique partenariale. Sont également détaillées une douzaine de recommandations opérationnelles.
De son côté, la ministre annonce la mise en place du réseau "Commerce, ville et territoire", une "instance de discussion récurrente" entre les acteurs de l’aménagement, du commerce et de la ville, qui fonctionnera sur le modèle du "Club PLUI". Autre mesure avancée par Emmanuelle Cosse, la création d’observatoires régionaux : "nous allons [initier] un protocole national pour essayer de lancer ces observatoires", indique-t-elle. Ils pourront "apporter une aide à la décision des acteurs locaux, notamment sur l’orientation stratégique de l’aménagement commercial dans les documents d’urbanisme", précise le ministère. Enfin, sera ouvert "avant l’été" un appel à projets "pour susciter des démarches exemplaires et innovantes dans le cadre de la réhabilitation de zones commerciales", avec à la clé un appui technique et financier s’élevant à 100 000 €.

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