Politique de la ville : la loi Lamy a enclenché une nouvelle dynamique

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"Deux ans et demi après la Loi Lamy, où en sommes-nous ?" C’était la question posée par l’association Ville et Banlieue,  à l’occasion d’un colloque organisé le 1er décembre. En réponse, les participants insistent sur la dynamique enclenchée.

Adoptée le 21 février 2014, la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine visait, selon François Lamy, porteur de ce texte et ancien ministre délégué à la ville, une volonté de "simplification et de renforcement des moyens en direction des quartiers prioritaires". Deux ans et demi plus tard, qu’en est-il ? "La réponse est loin d’être binaire", selon Sébastien Jallet, commissaire général délégué à l’égalité des territoires, directeur de la ville et de la cohésion urbaine (CGET), qui s’exprimait devant un parterre d’une petite centaine d’élus et de fonctionnaires territoriaux réunis à Allonnes (Sarthe) par Ville et Banlieue pour une journée-débat, jeudi 1er décembre. "Si la question est de savoir si les conditions de vie dans les quartiers sont satisfaisantes, la réponse est non. En revanche, si elle est de savoir si, depuis la mise en place de cette réforme, les choses tendent à s’améliorer, la réponse est plutôt oui…" Il insiste sur "le fait que la photographie n’est pas aisée car nous sommes sur un processus dynamique avec la mise en place d’outils structurels". Il fait référence aux nouveaux contrats de ville, à la refonte de la "géographie prioritaire", au NPNRU, aux conventions interministérielles et à la mise en place des conseils citoyens. "Tout cela demandera du temps pour produire des effets".

Implication des intercommunalités

Le CGET affiche toutefois un large sourire à l’évocation des 435 contrats de ville, soulignant surtout,  au-delà de l’aspect quantitatif,  "l’implication forte des intercommunalités" dans l’élaboration de ces documents,  comme le souhaitait le législateur. Les deux tiers sont portés par des intercos qui ont pris la compétence de la politique de la ville, décrit-il. Le maire (PS) de la Seyne-sur-Mer (Var) et président de Ville et Banlieue, Marc Vuillemot, est également satisfait de "cette appropriation, même si elle est encore très différenciée d’un territoire à un autre". "Quand nous regardons dans le détail, il reste effectivement du chemin à parcourir", poursuit Sébastien Jallet, citant "l’élaboration des pactes financiers et fiscaux de solidarité", mais aussi les rapports annuels qui doivent être réalisés par les intercommunalités, point important pour l’évaluation des politiques. Vice-président de la région Normandie en charge de la politique de la ville et maire (Modem) d’Hérouville Saint-Clair (Calvados), Rodolphe Thomas met également en garde face aux "risques d’éloignement des habitants avec cette échelle intercommunale". Constat appuyé par Gilles Leproust, maire (PC-FDG) d’Allonnes et vice-président de Ville et Banlieue, qui rappelle que Le Mans Métropole va passer de 14 à 19 communes au 1er janvier prochain.

Une géographie plus pertinente ?

La loi Lamy a identifié un critère unique "objectif" pour diffuser les moyens vers les quartiers les plus en difficulté : le revenu des habitants. "Il est peut-être plus lisible qu’une somme sortie d’un modèle mathématique que personne ne comprend", concède Patrice Allais, DGA au sein de Rennes Métropole (Ille-et-Vilaine) et à la tête du réseau Amadeus. Certes, mais ce critère fait que "nous passons à une politique de pauvreté qui nous éloigne de l’esprit d’origine de la politique de la ville", reprend Catherine Arenou, maire (LR) de Chanteloup-les-Vignes (Yvelines). Sébastien Jallet n’est pas du même avis : "nous ne sommes pas sur une carte de la pauvreté mais sur la concentration de la pauvreté". Nuance… Il ajoute surtout que ce "critère unique a mis fin à un mille-feuille insondable et inefficace", en référence aux ZUS, ZRU et autres ZEP qui entraînaient auparavant "une dilution des moyens". Au final, le nombre de quartiers prioritaires est passé de 2 500 à 1 500. Soit une baisse de 40 %. Et ce mode de calcul a permis de "faire entrer de nouveaux territoires dans la politique de la ville et de réparer ainsi une carence". A l’image d’Auch (Gers), de Guéret (Creuse), de Sablé-sur-Sarthe (Sarthe) ou de Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne).
La loi Lamy prévoyait aussi d’intégrer l’habitant dans la construction de cette politique de la ville, aux côtés de l’Etat et des collectivités. Selon Sébastien Jallet, il y aurait des conseils citoyens dans les deux tiers des quartiers prioritaires. "Ils existent, mais maintenant, il faut qu’ils vivent", lance-t-il. Ce qui sous-entend que les habitants soient formés, au même titre d’ailleurs que les pouvoirs publics, qui doivent pouvoir les accompagner. Ce défi de "faire vivre les conseils citoyens", "relais essentiels de la démocratie locale", figure d’ailleurs parmi les 31 propositions envoyées par Ville et Banlieue aux candidats déclarés à l’élection présidentielle.

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